Points clés
1. La quête des épices : Moteur de l'exploration mondiale
Au commencement étaient les épices.
Une demande insatiable. Dès l'Antiquité romaine, l'Occident développe un besoin ardent pour les "espiceries" orientales, transformant une cuisine fade et offrant de nouveaux parfums et remèdes. Ces denrées, comme le poivre valant son pesant d'argent, deviennent des symboles de richesse et des monnaies d'échange.
Un commerce périlleux. Le transport des épices depuis l'archipel malais vers l'Europe est une odyssée semée d'embûches, traversant des milliers de mains et des déserts infestés de pirates. Chaque étape augmente leur prix, faisant de Venise et des marchands musulmans les principaux bénéficiaires de ce commerce lucratif.
L'impulsion des découvertes. Cette situation pousse l'Europe à chercher de nouvelles routes maritimes, libres du monopole islamique et vénitien. L'ardent désir de contourner ces barrières, plus que la simple curiosité, est la force motrice derrière les grandes explorations de Colomb, Diaz et Vasco de Gama.
2. L'audace portugaise : Préparer l'impossible
Navigare necesse est, vivere non est necesse.
La vision de l'Infant Henrique. Le Portugal, petit pays enclavé, se tourne vers la mer grâce à la vision du Prince Henrique le Navigateur, qui consacre sa vie à développer la science nautique. Il défie les dogmes géographiques de Ptolémée, qui considéraient l'Atlantique comme infranchissable et l'Afrique incontournable.
Un développement systématique. Henrique établit une école de navigation au Cap Sagres, rassemblant savants et marins pour perfectionner les navires et les techniques. Il transforme les "barcas" en robustes caravelles, créant une nouvelle race de navigateurs intrépides.
Briser les mythes. Malgré des débuts modestes (traite des noirs, poussière d'or), le plus grand succès d'Henrique est moral : il détruit la peur du "cap Non" et de la "mer verte des ténèbres". Ses successeurs, comme Bartolomeu Diaz et Vasco de Gama, réalisent son rêve en contournant l'Afrique et atteignant les Indes.
3. Magellan : Le visionnaire méprisé par sa patrie
Mais en servant à tout, il apprend tout et devient en même temps soldat, marin, marchand, psychologue, géographe, océanographe et astronome.
Des années d'apprentissage. Fernão de Magalhães, un jeune noble portugais de rang modeste, passe sept ans au service du Portugal aux Indes, participant à des batailles cruciales comme Cannanore et Malacca. Il y acquiert une expérience inestimable en navigation, combat et survie.
L'ingratitude royale. Malgré ses blessures et son dévouement, Magellan est mal récompensé par le roi Manoel, qui lui refuse avancement et une pension décente. Accusé à tort de prévarication lors d'une campagne au Maroc, il est humilié et congédié.
La graine de l'idée. Son ami Francisco Serrao, établi aux îles des épices, lui écrit des lettres décrivant leur richesse et suggérant une route occidentale. Ce "nouveau monde" devient l'obsession de Magellan, qui se sent libéré de toute obligation envers un Portugal ingrat.
4. Une erreur féconde : La conviction d'un passage secret
Une erreur acceptée de bonne foi, tel fut en définitive le secret du grand navigateur.
Le plan audacieux. Magellan, avec l'aide de l'astronome Ruy Faleiro, élabore un plan pour atteindre les îles des épices par l'ouest, convaincu de l'existence d'un passage à travers le nouveau continent américain. Il s'appuie sur une carte de Martin Behaim et des rapports portugais.
Une information erronée. Ces informations, cependant, sont basées sur une confusion : les navigateurs portugais avaient pris l'embouchure du Rio de la Plata pour un détroit. Magellan, sans le savoir, fonde son projet sur une erreur géographique.
Le pouvoir de la conviction. L'histoire montre que de grandes découvertes naissent parfois de fausses hypothèses. La certitude inébranlable de Magellan, même si elle repose sur une erreur, est le moteur qui lui permettra de convaincre les puissants et de résoudre le grand mystère géographique de son temps.
5. La lutte acharnée pour l'Armada : Vaincre les obstacles terrestres
Mais l’homme qui crée est soumis à une loi plus haute que la loi nationale.
Le choix de l'Espagne. Rejeté par le Portugal, Magellan se tourne vers l'Espagne, offrant à Charles Quint non seulement son savoir nautique mais aussi un titre de propriété sur les îles des épices, qu'il prétend être dans la zone espagnole. Ce faisant, il trahit sa patrie pour sa vision.
Alliés et intrigues. À Séville, il gagne le soutien de Diego Barbosa (dont il épouse la fille) et de Juan de Aranda, directeur commercial de la Casa de Contratacion, intéressé par le profit. Le financier Christopher de Haro propose même de financer l'expédition, forçant la Couronne espagnole à s'engager.
La "Capitulacion" et les sabotages. Charles Quint signe le contrat, nommant Magellan capitaine-général. Cependant, le Portugal tente de saboter l'expédition par des pressions diplomatiques et des intrigues du consul Alvarez, qui attise la jalousie des capitaines espagnols.
6. La mutinerie de San Julian : L'autorité forgée dans le sang
Mais ce sont précisément les hommes les plus impitoyables qui accomplissent les plus grands exploits.
L'hiver patagonien. Après des mois de navigation difficile et la déception du Rio de la Plata, Magellan décide d'hiverner à San Julian, un lieu désolé, et réduit les rations. Le mécontentement gronde parmi l'équipage et les capitaines espagnols.
La rébellion éclate. Juan de Cartagena, Luis de Mendoza et Gaspar Quesada, estimant Magellan incompétent et arrogant, fomentent une mutinerie et s'emparent du San Antonio. Ils exigent des explications sur la route et les cartes de Magellan.
La riposte impitoyable. Magellan, avec une froide détermination, réprime la mutinerie. Il fait assassiner Mendoza par surprise, puis exécute Quesada et abandonne Cartagena et un prêtre sur la côte. Cette brutalité, bien que moralement discutable, rétablit son autorité et assure la survie de l'expédition.
7. La découverte du détroit : Le triomphe de la persévérance
Cet instant est le plus grand qu’ait connu Magellan, c’est un de ces moments de ravissement extrême dont un homme ne jouit qu’une fois dans son existence.
L'espoir vacillant. Après la perte du Santiago et des mois d'attente, Magellan, rongé par le doute, envisage de rebrousser chemin. L'ironie veut qu'il soit alors à quelques jours seulement du passage tant recherché.
Le "Cabo de las Virgines". Le 21 octobre 1520, la flotte découvre une baie profonde. Malgré le scepticisme des pilotes, Magellan insiste pour l'explorer. Après des jours d'angoisse et la crainte d'avoir perdu deux navires dans une tempête, la nouvelle tant attendue arrive : le passage est trouvé.
Le détroit de Magellan. Les navires s'engagent dans ce labyrinthe de fjords et de canaux, que Magellan nomme "canal de la Toussaint". Sa persévérance et sa prudence, malgré la désertion du San Antonio (avec Estevao Gomez), lui permettent de traverser ce passage périlleux sans accident.
8. La traversée du Pacifique : L'épreuve inhumaine
Si Dieu, dit-il, et sa Mère bénie ne nous avaient pas accordé un si beau temps nous serions tous morts de faim dans cette mer immense.
L'océan inconnu. Le 28 novembre 1520, les trois navires restants entrent dans l'océan que Magellan nomme "Pacifique" en raison de son calme initial. Cette traversée, d'une durée de 99 jours, est l'une des plus grandes épreuves de l'histoire maritime.
La famine et le scorbut. Les provisions s'épuisent, l'eau devient saumâtre, et l'équipage est réduit à manger de la sciure, des rats et même le cuir des vergues. Le scorbut décime les hommes, transformant les navires en hôpitaux flottants.
Mirages et désespoir. Des semaines passent sans terre en vue, les espoirs sont brisés par des "îles du Malheur" désertes. Seule la chance d'un temps clément et la volonté de Magellan permettent aux survivants d'atteindre enfin une terre habitée.
9. Le tour du monde accompli : Une vérité révélée par un esclave
Car cet esclave malais, dont nous ne connaissons que le nom de baptême, Henrique, [...] est le premier, parmi les myriades d’hommes qui aient jamais peuplé la terre, qui en ait fait le tour.
Les îles des Larrons et les Philippines. Le 6 mars 1521, la flotte atteint Guam, puis les Philippines. Après des conflits initiaux, les Espagnols se reposent et se ravitaillent, retrouvant force et espoir.
Le miracle d'Henrique. À Massawa, l'esclave malais Henrique comprend la langue des indigènes. Ce moment est la preuve irréfutable que Magellan a bouclé la boucle, revenant par l'Est à la sphère linguistique qu'il avait quittée par l'Ouest.
La Terre est ronde. Magellan réalise qu'il a prouvé la sphéricité de la Terre et trouvé la route occidentale vers les épices. Il pleure de joie, conscient d'avoir accompli l'exploit le plus grand de l'humanité, gagnant de nouvelles terres et âmes pour l'Espagne.
10. La mort du héros : L'ironie d'une fin inattendue
Ainsi périt, dans une bagarre stupide avec une horde de sauvages, le plus grand navigateur de tous les temps.
L'hubris de Magellan. Fort de ses succès, Magellan décide d'aider le roi Humabon de Sébu à soumettre un chef rebelle, Lapu-Lapu de Mactan. Il refuse les renforts, voulant prouver l'invincibilité espagnole avec seulement soixante hommes.
La bataille de Mactan. Le 27 avril 1521, l'expédition tourne au désastre. Les récifs empêchent les navires d'approcher, rendant les armes à feu inefficaces. Magellan, blessé et abandonné par la plupart de ses hommes, est tué par les lances indigènes.
Une fin ignoble. Le corps de Magellan n'est pas récupéré, Lapu-Lapu le gardant comme trophée. Le plus grand navigateur périt dans une escarmouche insignifiante, victime de son orgueil, avant d'avoir pu savourer son triomphe final.
11. Le retour du Victoria : La gloire posthume et le prix de l'oubli
Le 6 septembre 1522 s’achève ainsi le plus grand voyage sur mer qui ait jamais été accompli.
Le chaos après Magellan. La mort de Magellan brise le mythe de l'invincibilité espagnole. L'esclave Henrique, maltraité par Duarte Barbosa, se venge en orchestrant un massacre des Espagnols à Sébu. La flotte, réduite à deux navires, erre sans direction.
Del Cano prend le relais. Après l'incompétence de Carvalho, Sebastian del Cano, ancien mutin, prend le commandement du Victoria. Le Trinidad, trop endommagé, est laissé aux Moluques. Del Cano entreprend le périlleux retour par l'océan Indien, évitant les Portugais.
Le triomphe final. Après des mois de famine, de scorbut et de tempêtes, le Victoria, avec seulement dix-huit survivants, atteint San Lucar de Barrameda le 6 septembre 1522. Ils ont accompli le premier tour du monde, prouvant la rotondité de la Terre. Del Cano reçoit la gloire, tandis que Magellan, le véritable initiateur, est oublié par l'histoire officielle.
Dernière mise à jour:
Avis
Readers praise Stefan Zweig's biographical account of Ferdinand Magellan's historic first circumnavigation of the globe. The book captivates with its engaging, novelistic prose while maintaining historical rigor. Zweig skillfully portrays Magellan as a determined, taciturn leader who overcame mutinies, starvation, and treacherous conditions. The expedition began in 1519 with five ships and 265 men; only one ship and 18 survivors returned three years later. Though Magellan died in the Philippines, his discovery of the Pacific Ocean and the strait bearing his name proved Earth's roundness, forever changing world history and geography.
